Les cavaliers du diable, 2008 – 2013
où sommes-nous ?
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La nuit… des traces lumineuses, peut-être des voûtes célestes, un monde onirique, empreint de mystère.
Mais derrière le rêve apparent, se cache une réalité plus proche du cauchemar:
Ces traces sont les vestiges de la guerre civile au Darfour; des exactions perpétuées par les Janjawids (les cavaliers du diable) qui ont violé les femmes, tué les enfants, massacré les populations, avant de brûler les villages, ne laissant rien d’autre que les cendres des maisons et clôtures.
Pour la première fois dans sa carrière, l’artiste-photographe Jacques Pugin a choisi de travailler non pas sur ses images, mais en utilisant des clichés empruntés sur internet. En effet, ces photos satellitaires sont tirées de Google Earth, et ont été prises à des milliers de kilomètres du Darfour.
A leur état premier ces images sont des traces noires, mortes, de l’histoire archivée, ce que voit l’œil du satellite. Les échos des événements, comme disent les archéologues :
« Ceci est arrivé ici ».
Jacques Pugin a choisi d’appliquer à ces images un double traitement, d’une part en retirant la couleur, puis en les inversant, signifiant ainsi symboliquement le caractère fondamentalement noir et négatif de la barbarie dont elles sont le témoin. Le rendu des images en négatif transforme aussi les lignes noires en traces blanches, les remplissant de lumière, la lumière du passage du feu.
Le résultat très graphique et a priori abscons suscite dans un premier temps le questionnement, et ce n’est qu’après une lecture plus attentive que les images révèlent leur sens et leur violence.
Si ce travail s’inscrit dans la continuité des recherches entamées par le photographe en 1979 sur les traces, avec la série Graffiti Greffés, cette fois Jacques Pugin a une démarche plus politique. Alors que le Darfour est très difficile d’accès pour les journalistes reporters, l’artiste questionne le rôle d’internet, en faisant de Google Earth, de manière indirecte, une forme d’outil de reportage, de témoignage vu du ciel.
Isabel Rocamora
Christian Caujolle, 2014
On sait que, dès la première guerre mondiale, la photographie aérienne joua un rôle important. Outil de renseignement, enregistrement de la forme de tranchées en lacis à décrypter ensuite à des fins stratégiques, une cartographie inédite, héritière des expérimentations de Nadar s’envolant en ballon, balbutiait une fascinante histoire du point de vue, le « vu du ciel ». Il perdure, sous des formes utilitaires ou décoratives. La guerre, puisque c’est d’elle qu’il s’agit, changeait de dimension, en impliquant simultanément davantage de pays qui allaient vivre le sacrifice d’une génération de jeunes gens et faire surgir dans le moindre village des monuments aux morts attestant de la saignée, elle s’accompagnait aussi d’une modalité alors inédite de la «ephotographie appliquéee». Sur ces topographies, l’homme est absent. Elles serviront pourtant à le détruire parce qu’elles ont aidé des généraux à déterminer avec une précision plus « echirurgicalee », comme le disent ceux qui veulent faire croire aux guerres « eproprese », où il fallait frapper en priorité, quel champ il fallait noyer sous les bombes, quel boyau il fallait gazer, à l’assaut de quel tumulus il était préférable d’envoyer des gamins se faire étriper. Photographies, stratégie, tactique.
On redécouvre aujourd’hui, un siècle plus tard, ces images qui sont devenues à la fois des documents et des graphismes. Qu’est-ce que je vois sur une photographie ?
Presque un siècle après Verdun, c’est au Darfour, au cœur de l’Afrique, que les Janjawids, les «ecavaliers du diablee», ont fait disparaître 400’000 êtres humains, hommes, femmes, enfants, pendant que la communauté internationale, pétrie de bons sentiments officiels, se bouchait les yeux et les oreilles. Entre temps, à l’occasion du second conflit mondial et en raison d’une conception de la guerre qui se voulait plus «escientifiquee» dans ses critères de destruction de l’homme, le terme de génocide est apparu. «eSolution finalee». Le statut et les fonctions de la photographie avaient, eux, déjà changé. On était au début du temps du doute face à ce que l’on considère comme «el’âge d’ore» du reportage, celui du témoignage visuel par enregistrement codifié de moments, de faits, d’événements, massivement relayé et publié par la presse. On savait déjà que bien des images du premier conflit mondial étaient des photomontages et avaient été utilisées à des fins de propagande et non de connaissance.
Le doute sur la fonction de ces images – est-ce qu’une photographie peut informer, et sur quoi, de quoi ? – n’a, depuis, fait que s’accélérer avec le déclin prévisible d’une presse ignorant que la télévision avait pris le relais pour dire, plus efficacement, ce qui se passait sur le terrain. Et, de toutes façons, les photographes, les journalistes, les cameramen aussi, arrivaient toujours après que les viols aient eu lieu, après que les villages aient été incendiés, après que l’horreur ait été perpétrée. Restaient parfois des cadavres. Mais, s’ils sont pour certains photogéniques, les cadavres, en photographie, sont bien souvent équivalents, d’un conflit à l’autre, d’un continent à l’autre, d’une désespérance à une autre. Litanie funèbre qui ne dit rien, empêtrée qu’elle est dans le «aréalismee» apparent de la photographie. L’enfer étant toujours pavé de bonnes intentions, la pratique journalistique de la photographie, encore nourrie des illusions des exceptionnels moments de la chronique de la guerre du Vietnam touche ses limites. Naïfs ou retors, sincères ou désespérément accrochés à une volonté de survie, des professionnels tentent encore, en vain, de survivre. Il leur manque l’humilité d’aller revoir « Los desastres de la guerra » de Goya. Ils n’ont pas, à temps, franchi le pas vers le documentaire radical débarrassé d’illusions ou vers l’acceptation de leur inévitable subjectivité. Hélas.
Entre temps, le monde a radicalement changé. Les images et leur statut également. Et leur nature s’est diversifiée, est devenue plus complexe. Tout comme leur utilisation. Nous sommes passés du temps de la photographie, d’un vingtième siècle dont l’image argentique a constitué l’essentiel de la mémoire visuelle, à une autre ère, celle de l’image. La photographie tenait le monde à distance – question fondamentale de sa pertinence, de sa « justesse » – et tentait vraisemblablement, dans une forme de délire dominateur, de substituer au réel l’intégralité de sa représentation en images. En faisant semblant de le « reproduire fidèlement » et de l’enregistrer, elle le rendait irréel. Elle le rendait d’autant plus inaccessible que l’expérience première du monde, qui fut physique, transitait d’abord et de plus en plus par sa transcription. Au temps de l’image, cette dernière n’est plus extérieure mais structurelle. Et, comme elle est devenue majoritairement virtuelle, comparable aux flux financiers et boursiers, elle détermine largement la vision première. Une vision devenue illisible de par l’énormité de la masse de clichés produits et mis en circulation. Flots en perpétuel changement, en enrichissement aussi rapide que les destructions immédiates qui les accompagnent, crue indéchiffrable qui nous renvoie à ce statut d’ « analphabète de l’image » que prévoyait déjà Walter Benjamin.
Aujourd’hui, au temps des représentations majoritairement virtuelles et instrumentales, l’univers est sous contrôle d’outils de mise en forme. Caméras de surveillance – la collecte du son n’est pas en reste -, délire paranoïaque sécuritaire que ne font qu’aggraver les menaces terroristes bien réelles, l’œil n’est plus seulement dans la tombe mais juché sur l’orbite – tiens, comme celle de l’œil – des satellites. Surveiller, surveiller tout, en disant que c’est pour savoir, dans un délire de pouvoir. Relire Michel Foucault.
Les satellites enregistrent, transmettent, permettent de conserver un temps, d’accumuler des données codées, des combinaisons de chiffres. Elles sont ensuite recolorées, dans la grande tradition américaine de la NASA, pour proposer des visions séduisantes du monde. Tout aussi peu dénuées de « vérité » que la photographie analogique sur laquelle nous avons fondé des croyances en train de s’écrouler. Nous regardons comme de simples images des agencements de formes que les scientifiques qui ont voulu les générer dans leur processus de recherche savent interpréter. Interpréter, pas croire. Savons-nous ce qu’elles signifient ? Comme jadis, comme avant, c’est leur mise en contexte, leur usage qui déterminera leur fonction, qui leur permettra, ou non, de faire sens.
Qu’est-ce que je vois ? Et quand je vois, qu’est-ce que je sais ? Je vois des formes et je ne sais rien d’autre que ce que je porte en moi dans l’effort de re-connaissance de ces formes que j’effectue. Parce que la photographie n’informe pas, je projette en elle, vers elle, ma propre connaissance, effective ou ayant été transmise par des images préexistantes. Je décrypte aussi, si j’ai été éduqué à cela, le contexte dans lequel elles me sont proposées, présentées, afin que je perçoive l’intention de celui qui me les donne à voir.
Les caméras embarquées sur les satellites balayent, inlassablement, la surface du globe – des autres planètes également – et tentent de ne rien laisser échapper à cet enregistrement obsessionnel. Elles ont donc conservé trace des villages brûlés au Darfour entre 2003 et 2006. Ce n’était pas parce qu’elles cherchaient cela, simplement parce qu’elles « voient » tout. En résultent des images en couleur, mises en couleur, réalistes ou pas. Sur l’une d’entre elles, des maisons brûlent, feu immense surplombé de fumée noire ; sur d’autres, dans des étendues presque désertiques, beiges, des points, noirs, un peu de rouge. D’autres, interprétatives, laissent penser qu’il y a des arbres. Des marques écarlates, posées par des analystes, désignent les habitations détruites. Je n’en sais pas davantage que cette organisation abstraite des teintes. Voir n’est toujours pas savoir.
A quoi pourraient bien servir ces images ? Jacques Pugin leur a trouvé une fonction : à poser une question. A poser les questions précédentes, à les mettre en forme en tout cas. Il a ôté la couleur, a retrouvé le noir et blanc dont le graphisme nous éloigne des représentations figuratives et nous renvoie implicitement aux débuts de la photographie et à sa tradition. Pour s’en rapprocher encore, il a choisi de les inverser, de retourner aux origines, au négatif, à ce qui, dans d’autres temps, était fondateur en photographie : une empreinte, une matrice rendue possible par la lumière se confrontant aux volumes du réel pour le mettre à plat. Le re-présenter.
Ce que je vois, ce ne sont toujours que des formes. Ce pourrait être des incisions au stylet sur une plaque noire pour faire surgir dans une organisation de lignes, la blancheur de la matière sous-jacente. Goya aussi incisa des plaques, d’acier. Pour graver, en noir sur le blanc du papier, les désastres de la guerre.
Jacques Pugin s’approprie des formes existantes, créées par d’autres, produites par des machines. Attitude contemporaine s’il en est. Il les interprète pour nous proposer d’autres images, les siennes, qui disent sans hausser le ton : comment, aujourd’hui, peut-on représenter la guerre ?
Where are we?
Night… luminous traces, maybe celestial vaults, an oniric world full of mystery.
Hidden in what seems like a dream is a reality which is closer to a nightmare:
These traces are vestiges of the civil war in Darfour; abuse performed by the Janjawids (The Knights of the Devil), who raped the women, killed the children and slaughtered the population, before burning down the villages – leaving nothing but the ash of homes and fences.
For the first time in his career, Jacques Pugin, artist photographer, has chosen to work on images which are not his own, using clichés borrowed from the internet. These satellite images are actually extracted from Google Earth, taken from millions of kilometers above Darfour.
In their original state, these images are dead, black traces of archived history, as seen by the eye of the satellite. They are simply echoes of events. As archeologists would say: “This happened here”.
Jacques Pugin has chosen to work on these images by applying a double treatment. Firstly by draining all colour, making them black and white, and secondly by inverting them, pointing to the symbolic and fundamentally dark, negative nature of the barbarity which they witness. Turning the stills to negative also transforms all black lines into white traces, filling them with light – the light of the passage of fire.
On a first reading, the decidedly graphic yet seemingly obscure nature of these images stimulates our curiosity, yet it is upon deeper observation that the captured photographs reveal their intrinsic meaning, their violence.
If this work can be said to belong to the photographer’s continued research on traces, started in 1979 with the Graffiti Greffés (Grafted Graffiti) series, this time, Jacques Pugin’s drive is primarily a political one.
Conscious of journalists’ lack of access into the Darfour region, the artist questions the role of the internet by indirectly transforming Google Earth into a reporting tool that witnesses from high above.
Christian Caujolle, 2014 (English)
Aerial photography has played a significant role as a source of valuable information ever since the First World War, when precise recordings of the zigzags of the trenches enabled strategic analysis and unprecedentedly accurate mapping. The evolution of photography picked up where Nadar—who took photos from a tethered hot-air balloon—had left off. It came to offer a fascinating new perspective, the bird’s eye view, which has fulfilled functional and decorative needs ever since.
WWI was also a turning point for war itself, which is the real subject here. Changing in scope and countenance, war came to imply a multitude of nations, all of which would sacrifice of a generation of youth. It led to the erection of countless memorials to the dead, statements in even the smallest villages of the savageness of war. Applied photography came to be used in a new way, resulting in topographic portraits void of human presence. Such photos were used to destroy human life, for they enabled military leaders to determine “with surgical precision” (a term favored by proponents of “clean” warfare) where strikes would be most effective. They could figure out which fields to inundate with bombs, which trenches to flood with poisonous gas, and onto which rises on the landscape to send young men to be torn to shreds. Photography, strategy, tactics.
Nowadays, WWI photography appears to be a blend of historical record and graphic illustration. I wonder what we can actually see in a photograph.
A mere century after the calamitous Battle of Verdun, Darfur, in western Sudan, has become tragically famous for the Janjaweedmilitiamen, the “devil’s horsemen” who wiped out 400,000 human beings—men, women, and children—while the officially sympathetic international community averted its eyes and ears. And in between these two bloodbaths, the Second World War coined the “scientific” approach to war and human destruction, not to mention the termsgenocide and the final solution.
By this time, the status and function of photography had already changed. The so-called golden age of reporting was fading fast, as doubt spread about the reliability of the testimony and images relayed massively in the press. People knew that WWI photographs had been crafted to serve propaganda, not knowledge. This raised the question of whether photography is even capable of providing knowledge or information, and if so, what type? And on what basis? Once raised, such questions become impossible to shake.
Doubts about the function of photographic images have only increased with the decline of the press, a medium that chose to ignore that it was being replaced by television, a far more efficient means to relate what is happening in the field. In any case, photographers, journalists, and even cameramen always arrive on the scene afterthe rapes and burnings have taken place. Sometimes there are dead bodies to greet them and provide certain photographers with subject matter, but dead bodies look much the same from war to war, continent to continent, and disaster to disaster. They are meaningless funeral litanies, tangles of syllablesat odds with the apparent « realism » of the photographic image. Hell always has been paved with good intentions, and photo-journalism is no different. The myth of capturing extraordinary moments bred during the Vietnam War may well have faded, yet photo journalists have vainly attempted to hang on to this illusion. Is this naivety, shrewdness, sincerity, or a fundamental instinct for survival? Or have photo-journalists simply lacked the humility to go and see Goya’s The Disasters of War? In any case, they have unfortunately missed the opportunity to produce literal, illusion-free documentary pictures or to simply accept their inevitable subjectivity.
The world has changed and so has photography. Its inherent nature and use have become decidedly complex as the 20thcentury Era of Photography has given way to the current Age of the Image. Analog photos used to constitutea visual form of memory. Photographic legitimacy was rooted in a capacity to keep the world at bay, and photography responded to our urge to dominate reality by providing complete sets of pictures to replace it. Claiming to “faithfully” reproduce and record reality, photography essentially rendered it unreal. Reality became virtually inaccessible, for our most basic way of experiencing the world—through physical contact—was increasingly filtered through veils of interpretation.
We are now living in the Age of the Image, and filters are structural rather than external. Most images have become virtual, much like financial and stock markets, yet they still drive perception. Meanwhile, the sheer mass of pictures produced and circulated has made it nearly impossible to make sense of what we see. Countless, continually changing images simultaneously enrich and destroy. They are impossible to decipher, and we are reverting to a state of image-illiteracy, just as Walter Benjamin predicted.
The universe is now ruled by Photoshop et. al., and virtual and instrumentalized imagery is unremarkably ordinary. Surveillance cameras (sound recording systems were only the tip of the iceberg) are providing artificial answers to irrational desires for protection that only increase very real threats of terrorism. Big brother is not only following you into your tomb but is also perched on an orbiting satellite, watching everyone everywhere. You may call it knowledge, but it is still a delirious power trip. Reread Michel Foucault.
Indeed, satellites record, transmit, save, and accumulate coded image data and numeric sequences. The data is revised and re-colored as per NASA protocol to generate attractive pictures to present to the world. These images are as far removed from “truth” as the analog photos on which we once based now-shattered beliefs. We look at arrangements of shapes and colors as if they are illustrations, but only the research scientists who made them are capable of interpreting their meaning. Interpreting, not believing. Do we know what the images we see truly signify? As always, we need to know the context and function of an image to determine its purpose and eventual meaning.
What am I looking at? And when I look, what is genuinely comprehensible? I see shapes and know only what I am able to deduce by drawing from within myself and re-interpreting shapes I recognize. Photographs do not provide information. So we project knowledge gathered or gleaned elsewhere—sometimes from other photos—onto and into them. If we have learned how to analyze contextual factors, we focus on the circumstances in which photographic images are being presented to figure out what the intentions of those who are showing them might be.
Camera-equipped satellites tirelessly circle the globe and record picture after picture of the surface of our planet—and other planets—in an obsessive endeavor to capture each and every detail. Hence the images of the remains of the Darfur villages burned to the ground between 2003 and 2006. Satellite cameras were not intentionally looking for these images; they exist simply because the cameras “see” everything. The resulting color or colored pictures sometimes are, and sometimes are not, realistic. In one of them, houses are burning. A thick blanket of black smoke hangs above a massive wall of flames. Other pictures show barren, desert-like expanses. Beige-toned wastelands occasionally dotted with black or red specks. Still others, while open to interpretations, seem to suggest the presence of trees. Analysts have left red marks indicating where homes once stood. The only things clear to me are the abstract displays of color. You can see without knowing what you are looking at.
What purpose might these images serve? As far as Jacques Pugin is concerned, they can serve to raise, or at least shape, questions. Questions like those mentioned above. Jacques has removed the color from the images and returned to graphic black and white, distancing us from figurative representation and pulling us back to the early days of photography. To get even closer to these roots, Jacques has inverted the black and white to make pictures reminiscent of negatives, once the fundamental basis for photographs. In the beginning, photography was a process of capturing imprints, a transcription of what happens when light meets and then flattens the solid stuff of reality. Photography used to re-presenttangible reality.
What I see is shapes. Lines that could have been made by an etching needle on a black metal plate, a criss-crossing pattern that reveals the inner whiteness of the metal. Goya used to cut into steel plates. To make pictures of the disasters of war to be printed on white paper in black ink.
Jacques has taken shapes and images defined by others and produced by machines, and he has made them his own. What a modern course of action. He has interpreted the pictures, and now they ask his questions. Calmly and quietly, they ask, in today’s world, how can we show what war really looks like?
Voir d'Avantage



















