2014 La Côte, 13 mars 2014 (CH) par Céline Gavlak
2014 La Côte, 13 mars 2014 (CH)
2014 La Côte, 13 mars, par CECILE GAVLAK, à la Galerie AD-Galerie, Nyon, Suisse
En plus d’être photographe, Jacques Pugin crée des mots. Son exposition intitulée « La montagne d’ombre et delumière » à l’AD Galerie, à Nyon, est tirée du livre « La montagne s’ombre » qui vient de paraître. Ce verbe pronominal inventé exprime avec justesse l’idée d’une montagne qui se pare elle-même d’une ombre par l’intervention du photographe. Il fallait au moins un tel jeu de mot sonore pour rendre compte de l’effet intrigant qui se dégage des images.
C’est la deuxième exposition que le galeriste Alexandre Devis, auparavant basé à Genolier, organise dans son nouveau lieu sur les quais de Nyon. Lorsqu’on demande aux deux hommes où ils se sont rencontrés, il leur faut peu de temps pour se souvenir qu’ils se sont connus sur une terrasse d’Arles lors des Rencontres photographiques. Pas étonnant pour ces deux passionnés.
Cette exposition marque aussi pour le galeriste un virage en douceur du noir et blanc vers la couleur. Car les prises de vue de Jacques Pugin ont cette particularité d’être dominées par des bleus sombres qui tranchent avecla neige.
Le Cervin et les autres
Sur la douzaine de photographies exposées, on découvre sous des points de vue inattendus et avec des couleursanormales, le Cervin ainsi que d’autres sommets des Alpes, comme le glacier d’Aletsch. On n’échappe pas à l’attrait de certains symboles, les images du Cervin restent celles qui se vendent le plus. « Mais, pour moi, peu importe le lieu photographié, ce n’est finalement pas ça l’important » , souligne Jacques Pugin. Cet amoureux du monde alpin se définit comme peintre plutôt que photographe, à la quête de traces, son obsession qui dure depuis trente ans.
Dans cette série, « La montagne s’ombre », il retouche les photos pour que les ombres sur la roche ou sur la glace deviennent bleues. Derrière, le ciel est d’un blanc qui le rend absent. « Je l’extrais pour ne garder que l’essence de la montagne. Car, dans la réalité, à cette altitude, le ciel est bleu foncé. Je le modifie pour obtenir ce résultat
presque monochrome. » Dans ces paysages, toute forme de vie a disparu. Ni hommes, ni animaux, ni végétation. Seule la force de la montagne, dans une paix immobile et grandiose, se dégage des photographies. Des masses bleues, parfois presque métalliques, lunaires, créent une ambiance de fin du monde.
L’artiste, basé à Paris, réalise ce travail de précision sur des photos numériques avec un logiciel informatique. Jacques Pugin assume. Mais il rappelle que dans le passé, il a longtemps peint directement sur ses photos. Aujourd’hui, seul l’outil a changé. D’ailleurs, à y regarder de près, certaines retouches s’apparentent à des coups de pinceau. « Je travaille avec un crayon digital, le geste est donc le même » , explique-t-il, avec un calme identique à celui qui se dégage de ses paysages.